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Le Laboratoire de Physique des Plasmas (LPP) de Paris mène un projet associant des technologies plasma afin de produire du méthane à partir de dioxyde de carbone de façon la plus décarbonée possible. Un prototype démontrant l’efficacité du procédé est en conception.

La transition énergétique est un enjeu majeur de la lutte contre le réchauffement climatique, dont les clés reposent sur le développement des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, la sobriété, le stockage du dioxyde de carbone (CO2) ou encore le recyclage d’une partie du CO2 émis par les activités humaines.

Dans la suite de ses travaux de thèse, la Société d’accélération de transfert technologique (SATT) de Paris-Saclay vient d’accorder à Edmond Baratte un financement visant à améliorer un prototype permettant la conversion d’un mélange de CO2 et de dihydrogène (H2) en méthane (CH4). Cette dernière molécule est celle du gaz naturel, très utilisé pour le chauffage par exemple. Ce processus de méthanation – qui diffère de la méthanisation, qui forme également du méthane à partir de la décomposition de déchets – diminue le recours aux ressources fossiles, à condition que le H2 soit également produit avec une faible empreinte carbone, par exemple par électrolyse de l’eau.

A l’heure actuelle, la méthanation est peu utilisée à l’échelle industrielle. Quelques démonstrations ont été réalisées. « La méthode principale consiste à chauffer et comprimer un mélange CO2 et H2, mais cela nécessite d’apporter beaucoup d’énergie, souligne Edmond Baratte. L’idée de l’approche par plasma consiste à faire un dépôt d’énergie ciblé sur les molécules pour déclencher la réaction, sans gaspiller trop d’énergie en chaleur. »

Les plasmas représentent un état de la matière dans lequel des électrons sont arrachés des atomes auxquels ils sont normalement associés. Lorsque la température du gaz reste basse, comme c’est le cas ici, on parle de plasmas « froids ». Il s’agit d’un des domaines où le LPP fait figure d’expert. L’application d’un champ électrique permet d’accélérer les électrons du plasma, qui communiquent leur énergie aux molécules de CO2, facilitant sa dissociation.

Au cours de sa thèse, Edmond Baratte s’est penché sur les mécanismes fondamentaux du recyclage conjoint du CO2 et du CH4 par plasma. « Ces plasmas sont intéressants mais aussi difficiles à analyser car plusieurs chemins de réactions chimiques peuvent se produire, parfois en parallèle. » Les chercheurs ont toutefois pu mettre au point un modèle numérique qui permet de prédire les chemins de réaction, c’est-à-dire comment les molécules se dissocient et se réassemblent.

Dans le projet « Cycles » financé par la SATT, l’objectif sera de démontrer l’efficacité de la méthanation par plasma à décharge radiofréquence, avec des volumes de CO2 traité de l’ordre du m3 par jour, compatibles avec l’échelle industrielle. Le but consiste également à tester des conditions semblables à celles de la sortie d’une cheminée d’usine, où le mélange de gaz n’est jamais pur, mais contient aussi du diazote (N2) par exemple.

Parmi les défis qu’il faudra encore surmonter pour construire un prototype de réacteur plasma, il s’agira de trouver les meilleurs catalyseurs métalliques possibles afin de diminuer l’énergie à fournir pour déclencher la méthanation. Si le succès est au rendez-vous, Edmond Baratte envisage de fonder une start-up ou d’effectuer un transfert technologique vers un éventuel partenaire industriel.

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