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Telle une empreinte que l’on laisse derrière soi, dans le sol, l’eau ou l’air, l’ADN environnemental permet de suivre l’état de la biodiversité. Une nouvelle étude dévoile une méthode innovante pour capter ces traces : les piéger dans des toiles d’araignées.

Dans un contexte de sixième extinction de masse, estimer quelles espèces se côtoient est essentiel : les espèces disparaissent à une vitesse vertigineuse et nous manquons de moyens pour le quantifier. Mener cet inventaire est crucial, mais laborieux s’il s’agit de référencer chaque espèce “à la main” – cela demande plusieurs jours pour un seul espace et n’est jamais totalement exhaustif !

Aussi, une méthode prometteuse se développe depuis quelques années pour scanner rapidement l’état de la biodiversité à un instant donné, c’est l’ADN environnemental. L’ADN environnemental provient de quelques-unes de nos cellules que nous laissons après avoir posé la main sur un objet, de notre respiration ou notre transpiration, qui larguent aussi des cellules dans l’air et par conséquent des traces d’ADN. Ainsi, tous les organismes dans la nature relâchent des traces d’ADN derrière leur passage sous la forme de fragments de génome.

L’ADN environnemental peut se tracer dans des prélèvements d’eau et de sol, notamment grâce à certains fragments spécifiques de chacune des espèces. Leur séquençage en laboratoire permet ainsi d’établir une liste des espèces qui sont présentes dans un environnement donné. Or, si l’air était une matrice jusqu’à présent difficile à exploiter pour caractériser ces traces d’ADN environnemental, des biologistes se viennent de proposer une méthode innovante parue dans iScience : aller pêcher l’ADN environnemental grâce aux toiles d’araignées, en piégeant les fragments d’ADN flottants dans l’air comme dans un filet.

Cette nouvelle étude prouve que lorsqu’elles sont emprisonnées sur des toiles d’araignées, ces traces sont tout à fait utilisables pour déterminer des communautés d’espèces.

Les chercheurs ont étudié 49 toiles d’araignées provenant de deux sites d’Australie occidentale : le zoo de Perth et la réserve naturelle de Karakamia, une zone de brousse de 268 hectares située à une cinquantaine de kilomètres à l’est de Perth.

Leur analyse a permis d’obtenir près de 2,5 millions de séquences d’ADN, qui ont été traitées en partie à l’aide de la technologie PCR, la même que celle utilisée dans les tests de dépistage du covid-19. Un peu plus d’un million de séquences ont été identifiées comme humaines et exclues de l’analyse.

Les membres de l’équipe ont en outre détecté de l’ADN de vertébrés non humains dans tous les échantillons de toiles qu’ils ont testés. Les toiles du zoo de Perth ont révélé un total de 61 espèces de vertébrés, dont 33 mammifères, 21 oiseaux, 5 reptiles et 2 amphibiens. Pour deux des plus grandes espèces du zoo – les éléphants d’Asie et les girafes du Nord – l’équipe a même trouvé de l’ADN à près de 200 mètres des enclos des animaux.

Traquer le passage d’animaux grâce à l’ADN perdu dans l’environnement par les êtres vivants lors de leurs activités et leurs déplacements permet de recenser la biodiversité. Cet ADN environnemental constitue en outre un outil de surveillance relativement rapide et non invasif, que les toiles d’araignées permettent de capture au passage d’un animal.

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