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Jusqu’au 16 février 2025, l’exposition Zombis : La mort n’est pas une fin ? au Musée du quai Branly – Jacques Chirac invite les visiteurs à plonger dans les racines historiques et scientifiques de ce mythe issu principalement de la culture haïtienne.

Cette approche multidisciplinaire permet de dévoiler le rôle complexe et symbolique du zombie dans les sociétés caribéennes, tout en offrant une réflexion sur les notions de vie, de mort et d’asservissement.

Historiquement, la figure du zombie en Haïti est indissociable de l’histoire de l’esclavage colonial. Au XVIIIe siècle, Haïti, alors colonie française sous le nom de Saint-Domingue, était un centre de production sucrière où des milliers d’esclaves africains étaient déportés et forcés à travailler dans des conditions épouvantables. Dans le folklore haïtien, le zombie est ainsi un être privé de volonté, réduit à l’état de marionnette sans âme, manipulée par un maître. Il n’est pas un être qui revient de la mort pour terroriser les vivants, comme dans la culture populaire moderne, mais plutôt une personne que l’on a « dépossédée » de son être profond. Des sorciers vaudous, appelés bokors, sont supposés capables de capturer l’âme d’un individu et de le transformer en zombie, un « esclave » sans conscience ni volonté propre, symbolisant la domination et la déshumanisation imposées par l’esclavage.

Sur le plan scientifique, l’exposition s’intéresse aux bases chimiques et biologiques qui ont pu inspirer le mythe du zombie. Certaines pratiques vaudoues font usage de poisons naturels, tels que la tétrodotoxine, présente dans le poisson-globe, ou fugu. Cette toxine puissante peut provoquer une paralysie qui donne l’apparence de la mort. Certains spécialistes en ethnobotanique et en pharmacologie ont émis l’hypothèse que les bokors pouvaient utiliser de petites doses de cette toxine pour induire un état de « mort apparente » chez leurs victimes. Par la suite, les individus auraient été « réanimés », présentant un état de confusion mentale et de dépendance, caractéristiques attribuées aux zombies.

Ce phénomène intrigue particulièrement les chercheurs en neurosciences, qui voient dans cet état de conscience altérée un cas d’école pour mieux comprendre les effets de certaines substances psychoactives et les limites de la conscience humaine. Il illustre particulièrement comment des croyances culturelles et des phénomènes biologiques ont pu se combiner pour nourrir un mythe durable.​

Au-delà des aspects historique et scientifique, l’exposition offre une réflexion philosophique sur la notion de « non-mort » qu’incarne le zombie. Dans la culture vaudoue, le zombie représente un être entre la vie et la mort, privé de son identité et de son humanité. Ce concept d’état « liminal » questionne les frontières entre ces deux états.

Pour rendre cette expérience plus engageante, l’exposition propose des activités interactives et des événements, notamment des projections de films, des conférences et des visites guidées qui plongent les visiteurs dans l’univers fascinant des zombies haïtiens.

Zombis : La mort n’est pas une fin ? est ainsi une exploration culturelle, historique, et scientifique d’un mythe profondément enraciné dans notre imaginaire collectif. En mettant en lumière les origines vaudoues du zombie, le Musée du quai Branly – Jacques Chirac invite les visiteurs à dépasser les stéréotypes pour découvrir une figure riche de significations et de symbolisme. Elle montre comment un mythe peut être à la fois le reflet d’une histoire tragique et un sujet d’étude pour les sciences modernes, offrant une rencontre inédite entre anthropologie, science et art​.

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